Le choc des mondes, le film de 1951  Feu vert cinéma

When Worlds Collide (1951)
Traduction du titre original : Quand les mondes entrent en collision

Sorti aux USA le 22 novembre 1951.
Sorti en France le 20 juillet 1952.
Sorti en DVD Belge le 12 septembre 2002.

De Rudolph Maté ; sur un scénario de Sydney Boehm ; d'après le roman de 1933 de Edwin Balmer et Philip Wylie ; avec Richard Derr, Barbara Rush, Peter Hansen, John Hoyt, Larry Keating, Rachel Ames, Stephen Chase, Frank Cady, Hayden Rorke, Sandro Giglio. Produit par George Pal.

Des aiguilles – dans une botte de foin céleste… Il y a plus d’étoiles dans les cieux qu’il y a d’êtres humains sur la Terre. À travers leurs télescopes, les hommes de Science constamment fouillent les recoins infinis de notre système solaire, en quête de nouvelles trouvailles, espérant mieux comprendre les lois de l’Univers… Les observatoires dédiés à l’étude de l’Astronomie sont souvent placés dans des lieux élevés et reculés. Mais il n’y en aucun aussi reculés que l’Observatoire du Mont Kenna dans cette partie de l’Afrique du Sud.

Trois hommes travaillent sous le dôme de l’Observatoire. L’un d’eux, Emery Bronson, portant une barbiche, est assis devant un écran et se redresse : si leurs calculs sont corrects, ils auront fait la découverte la plus effrayante de tous les temps ! Bronson ajoute que les deux corps célestes détectés auront traversé presque un million de miles en deux semaines. Il s’interrompt alors que le bruit des moteurs d’un avion grossit, et les trois scientifiques lèvent la tête vers le plafond.
Stanley, l’astronome à la droite de Bronson demande si c’est Randall, et Bronson répond qu’il l’espère. Puis Bronson ajoute à l’attention du troisième scientifique, Paul, qui porte une blouse blanche, qu’il veut que Randall reparte aussi vite que possible : toutes les plaques photographiques sont prêtes, cataloguées et marquées pour identification. Paul ajoute aux boites jaunes une dernière boite, les plaques photographiques impressionnées de cette nuit. Bronson s’en réjouit : il a dit au professeur Henron qu’il lui ferait parvenir le plus grand nombre de détails à leur disposition. Puis, se levant et s’éloignant de quelque pas, Bronson ajoute à l’attention de Stanley et de Paul, qu’il ne sera pas nécessaire de préciser à Randall ce qu’il emporte. Stanley et Paul se regardent, puis Paul ajoute une note au contenu d’une valisette et Stanley referme la valisette.

De fait, Dave Randall partage son étroit cockpit avec une jolie blonde. Il reçoit l’appel radio de Russ Curtis de l’aéroport de Mont Kenna qui lui annonce que la piste d’atterrissage numéro trois est dégagée, que la visibilité est bonne, et qu’une voiture l’attend pour l’emmener à l’Observatoire. Randall ne prête qu’une attention limitée au message, occupé qu’il est à embrasser sa blonde, et Russ Curtis doit répéter « Over » avant que le pilote daigne lui répondre qu’il a bien reçu le message.

Plus tard, Randall attend sous le dôme près des pupitres quand arrive Stanley par l’escalier de fer menant au télescope. Stanley s’étonne que Randall ait été retenu sur l’aéroport, vu qu’il a atterrit deux heures auparavant. Randall prétend alors qu’il avait à son bord la tante de l’un de ses amis qu’il devait ramener chez elle. Arrive le professeur Bronson, qui rappelle que Randall leur a été chaudement recommandé. Randall s’étonne qu’il ait besoin de recommandation seulement pour livrer un paquet.

Bronson répond par une question : est-ce que Randall a pris avec lui son passeport avec le visa des Etats-Unis. Randall suit Bronson à son bureau et répond que oui – mais insiste : à qui doit-il livrer quoi ? Bronson rétorque que selon les recommandations, il pouvait compter sur le manque de curiosité de Randall. Randall répond, sur un ton plus bas qu’il se fiche de ce que Bronson trafique : il veut juste savoir où il doit se rendre et quand il doit être payé. Bronson baisse aussi le ton et s’excuse – il ne voulait pas se montrer grossier. C’est seulement que le secret est très important au point où ils en sont. Randall devra voler jusqu’à Lisbonne, puis prendre le un vol transatlantique pour New-York. La livraison devra être faite au professeur Hendron de l’Observatoire Cosmos. Et Bonson tend à Randall une enveloppe contenant trois photos noir et blanc du professeur Hendron – de face, et de ses deux profils : Randall doit lui livrer personnellement l’objet – et Bronson insiste, Randall doit s’en souvenir : à remettre au seul professeur Hendron. Puis Bronson sort son portefeuille et en tire des billets pliés qu’il remet à Randall pour ses frais.

Randall compte les billets – et s’étonne : il était supposé gagner 1500 dollars plus les frais ! Bronson répond que Hendron paiera à réception, et ajoute qu’il n’y a que le temps qui compte. L’argent ne compte absolument pas. Randall répond qu’avec lui, l’argent compte toujours. Bronson réplique que c’est peut-être le cas pour l’heure, mais un jour viendra peut-être où l’argent n’aura plus aucune signification pour Randall ou pour qui que ce soit d’autre. Randall répond que quand cela lui arrivera, il sera six pieds sous Terre. Alors Stanley passe une menotte au poignet de Randall et lui souhaite bonne chance. La menotte est reliée à une valisette métallique cerclée de fil de fer cacheté. Randall est soudain inquiet, mais quand Stanley lui remet la clé de la menotte en souriant, Randall est soulagé.

A bord de l’avion qui l’emmène à New-York, l’hôtesse de l’air remet à Randall un radiogramme de plus envoyé depuis le décollage. Randall remercie l’hôtesse, celle-ci insiste sur le fait qu’elle espère que Randall apprécie son voyage, et quand la jolie jeune femme s’en va, Randall se retourne pour admirer le carénage arrière de l’hôtesse de l’air. Puis il ouvre le radiogramme : il provient d’un certain Donovan travaillant pour le New-York Sentinel, un journal, qui lui propose encore plus d’argent qu’au premier radiogramme – 5000 dollars au total pour des révélations exclusives sur le contenu de la « boite noire ». Randall est troublé, hésite, puis chiffonne le radiogramme.

Plus tard, Randall se présente à la douane de New-York, hésitant, sa valisette noire menottée à sa main. Au même moment, Joyce Hendron, la fille du professeur observe l’arrivée des passagers avec un homme moustachu en costume cravate. Joyce pense avoir repéré l’homme qui les intéresse, transportant la « boite noire ». Aussitôt, l’homme moustachu vient trouver David Randall et exige de voir son passeport, réclame à la douane le bagage de Randall et escorte ce dernier jusqu’à Joyce Hendron, qui se présente et lui annonce qu’ils iront directement jusqu’à l’observatoire. Comme ils vont pour quitter les lieux, un journaliste court vers eux en appelant Randall deux fois. Il se présente comme étant Donovan, du Sentinel. Randall lui répond qu’ils se verront une autre fois, mais Donovan insiste : ils ont augmenté leur offre – 7500 dollars. Et Donovan présente un chèque à l’ordre de Randall, qui répond « non merci » : il travaille sur une meilleure offre. Et s’en va au bras de Joyce Hendron, tout sourire.

Dans le taxi, Joyce déclare qu’elle n’arrive pas à imaginer comment le Sentinel a eu vent de la mission de Randall, cependant elle comprend qu’il soit difficile de garder le secret avec les journaux. Elle ajoute qu’elle est heureuse que Randall ait refusé leur offre – car il se rend bien sûr compte de ce que cela voudrait dire si le public disposait de cette information prématurément. Randall répond que bien sûr, il comprend cela très bien… Encouragée, Joyce reprend qu’ils ont tous priés pour que le professeur Bronson se trompe, pour que les photographies en question démontrent qu’il y a une erreur dans ses calculs. Puis elle demande à Randall s’il n’aurait pas préféré ne pas savoir. Alarmé, Randall répond que non, c’est mieux de savoir. Joyce répond qu’elle aurait aimé avoir son courage, mais elle est épouvantée. Aussi épouvantée que tous ces gens le seraient s’ils savaient. Et devant Dave Randall cramoisi, elle ajoute, les yeux baissées, qu’elle n’a pas le courage de faire face à la fin du monde.

Le choc des mondes, le film de 1951

Le choc des mondes, le film de 1951

Le choc des mondes, le film de 1951

Le choc des mondes, le film de 1951

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Flight To Mars, le film de 1951Feu orange cinéma

Flight To Mars (1951)
Traduction du titre : Vol pour Mars.

Sorti aux USA le 11 novembre 1951.
Sorti en France le 11 juin 1954.
Sorti en blu-ray américain le 20 juillet 2021 (blu-ray 2K, The Film Detective).

De Lesley Selander ; sur un scénario de Arthur Strawn, inspiré du roman Aelita de 1923 de Tolstoï, déjà adapté en film en 1924 ; avec Marguerite Chapman, Cameron Mitchell, Virginia Huston, Arthur Franz.

Pour adultes et adolescents.

Un homme plus jeune dialogue avec un homme âgé assis à un énorme télescope qui observe la planète Mars. Ils se demandent si l’expédition qui doit partir dans deux jours arrivera sur cette planète et ce qu’ils y trouveront. De la vie peut-être, d’un certain genre. Et ils se demandent aussi si un jour ils auront un télescope assez puissants pour voir ce qui se passera là-bas.

Plus tard, au Pentagon, le centre de commandement militaire américain aux USA, des gradés et des hommes en costumes noirs à chapeaux mous assortis arpentent un couloir devant un garde replet et binocleux en casque blancs. Le plus gradé, sans doute un général, ouvre lui-même la porte vitrée d’un bureau de transmission (non gardé), et tend une feuille de papier que le préposé s’empresse de dactylographier sur son télétype. À l’autre bout des ondes ou du fil, la machine imprime un communiqué de presse : le gouvernement des USA au monde (ébahi, comme il se doit) que toutes les premières pages et les bulletins d’informations radiodiffusés doivent retenir leur une pour cette nouvelle : les préparatifs ultimes pour lancer une fusée à réaction en direction de Mars ont été complétés. Et c’est le message le plus important que le Pentagon aura jamais communiqué s’il faut en croire le général à deux civils qui semblent à la limite d’en rire.

Flight To Mars, le film de 1951

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Le jour où la Terre s'arrêta, le film de 1951Feu vert cinéma

Ici la page Amazon.fr du blu-ray français du Jour où la Terre s'arrêta (1951)

The Day The Earth Stood Still (1951)

Sorti aux USA le 28 septembre 1951.
Sorti en France le 18 septembre 1952.
Sorti en blu-ray américain le 2 décembre 2008.
Sorti en blu-ray français le 11 décembre 2008.

De Robert Wise. Michael Rennie, Patricia Neal, Hugh Marlowe, Sam Jaffe, Billy Gray, Frances Bavier. D'après la nouvelle de Harry Bates "Farewell to the Master" (1940).

Un objet extraterrestre a été repéré en approche de la Terre et il ne s'agit pas d'une simple histoire de soucoupe volante : l'objet non identifié survole désormais l'Amérique du Nord, descend sur Washington, et devant les promeneurs médusés, puis paniqués, une véritable soucoupe volante atterit en plein milieu du Parc. Les forces de la police et de l'armée convergent vers le site d'atterrissage, toutes les émissions de télévision et de radio sont interrompues. Les autorités sont rassurantes : les rumeurs de force d'invasion sont fausses, il n'y a qu'un vaisseau spatial, et aucun signe de vie de sa part, tandis qu'un cordon militaire et policier l'isole du public accouru en masse.

Au moment même où le présentateur annonce qu'il ne se passe rien, une porte apparait dans la soucoupe, ainsi qu'une rampe, et une silhouette humanoïde en sort. L'être affirme qu'il vient en paix, puis sort un engin de sa combinaison, qui s'ouvre comme une fleur. Un soldat tire et l'extraterrestre s'effondre, tandis que son engin s'est brisé à terre. Alors un autre être sort de la soucoupe, d'allure plus agressive. De sa visière jaillit un rayon éblouissant, qui désintègre les armes et liquifient les tanks et les canons autour de lui. L'extraterrestre se relève et explique que l'engin n'était qu'un cadeau pour le président. Puis l'armée l'emmène à l'hôpital où le secrétaire du président vient trouver l'extraterrestre, qui dit s'appeler Klaatu et se trouve avoir une apparence humaine. Kaatu explique qu'il est venu délivrer un message à toute la population humaine, et souhaite rencontrer tous les représentants des nations humaines.

Le secrétaire répond que la situation actuelle du monde ne le permet pas, et tente de le convaincre qu'une faction est plus maléfique qu'une autre, mais l'extraterrestre n'est pas intéressé : il veut parler à tous, simultanément. Comme le secrétaire pense que Klaatu ne veut pas comprendre la situation, celui-ci répond qu'il ne souhaite pas faire de menace, mais que le futur de la planète est en jeu.

Le jour où la Terre s'arrêta (1951)

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Marionnettes humaines, maîtres du monde, le roman de 1951Feu vert livre / BD

The Puppet Masters (1951)
Traduction du titre anglais : Les marionnettistes.
Titres français : Marionnettes humaines (1954), les maîtres du monde (1995).

Paru pour la 1ère fois dans les numéros de septembre à novembre 1951 de Galaxy Science-fiction ;
Paru en grand format le 10 octobre 1951 chez DOUBLEDAY US.
Traduit en français en avril 1954 par Alain Glatigny chez Hachette Le Rayon Fantastique,
Réédité chez Denoël Présence du Futur en novembre 1972, novembre 1979, juin 1984, mai 1995
Puis chez Gallimard Folio SF en septembre 2005 réédité en mars 2011.

Adapté plutôt fidèlement en film The Puppet Masters 1994.

De Robert Heinlein.

Pour adultes et adolescents.

(presse, invasion extraterrestre) Dans un futur proche où Manhattan n’est plus qu’un cratère, Sam Cavanaugh et sa sœur Mary débarquent avec leur oncle Charlie à Des Moines, Iowa, où ils s’apprennent à jouer les touristes irresponsables et surtout curieux. Ce sont en réalité des agents de la protection du territoire chargé d’enquêter sur la rumeur d’une soucoupe volante qui aurait atterri là-bas…

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Marionnettes humaines, maîtres du monde, le roman de 1951

Le texte original de Robert Heinlein pour le magazine Galaxy Science-Fiction de septembre 1951 et DOUBLEDAY US

The Puppet Masters

For me it started too early on July 12, 2007, with my phone shrilling. The sort of phone my section uses is not standard; the audio relay was buried surgically under the skin back of my left ear—bone conduction, and skull lifting.

“All right,” I growled. “I hear you. Shut off that damned noise.”
“Emergency,” a voice said in my ear. “Report in person to the Old Man. At once.”

“Moving,” I acknowledged and sat up with a jerk that hurt my eyeballs. I went into the bath, injected a grain of “Gyro” into my arm, then let the vibro exercise machine shake me apart while the drug put me together, or at least a good mockup of one, and got my jacket.

There is one thing no head of a country can know and that is: how good is his intelligence system? He finds out only by having it fail him. Hence our section. Security suspenders and belt, you might say. United Nations had never heard of us, nor had Central Intelligence—I think. All I really knew about us was the training I had received and the jobs the Old Man sent me on. Interesting jobs if you don’y care where you sleep, what you eat, nor how long you live. If I had had any sense, I’d have quit and taken a regular job.


The only trouble with that would be that I wouldn’t have been working for the Old Man any longer. That made the difference.

Not that he was a soft boss. He was capable of saying, « Boys, we need to fertilize this tree. Jump in that hole at its base and I’ll cover you up.”


We’d have done it. Any of us would. And the Old Man would bury us alive, too, if he thought there was a 53% probability that it was the Tree of Liberty he was nourishing.

He got up and limped toward me as I came into our section offices through a washroom booth in MacArthur Station. His face split in a wicked smile. His big hairless skull and his strong Roman nose made hum look like a cross between Satan and Punch’s Judy. “Welcome, Sam,” he said. “Sorry to get you out of bed.”


The deuce he was sorry ! « I was on leave, » I answered shortly.
“Ah, but you still are. We’re going on a vacation.”
“So my name is ‘Sam’,” I answered deliberately ignoring his “vacation” crack. “What’s my last name?”
“Cavanaugh. And I’m your Uncle Charlie—Charles M. Cavanaugh, retired. Meet your sister Mary.”

I had been aware that there was another person in the room, but when the Old Man is present, he gets full attention as long as he wants it. Now I looked over my “sister” and then looked her over again. It was worth it.

I could see why he had set us up as brother and sister if we were to do a job together; it would give him a trouble-free pattern. An indoctrinated agent can’t break his assumed character any more than a professional actor can intentionally muff his lines. So this one I must treat as my sister—a dirty trick if I ever met one…

*

La traduction au plus proche

Les marionnettistes

Pour moi, cela a commencé trop tôt, le 12 juillet 2007, avec la stridulation de mon téléphone. Le type de téléphone utilisé par ma section n'est pas standard ; le relais audio a été enfoui chirurgicalement sous la peau à l'arrière de mon oreille gauche — conduction osseuse, et soulèvement du crâne.

« Très bien, je grognai. Je vous entends. Arrêtez ce foutu bruit. »
« Urgence", dit une voix dans mon oreille. Présentez-vous en personne au Vieux. Tout de suite. »
« En mouvement, je confirmai, et je me redressai d'un coup sec qui me fit mal aux globes oculaires. J’allai dans la salle de bain, j’injectai un grain de Gyro dans mon bras, puis je laissai l'appareil d'exercice vibrant me secouer pendant que le médicament me reconstituait, ou du moins un bon semblant, et je pris ma veste.

Il y a une chose qu'aucun dirigeant d’un pays ne peut savoir, c'est la qualité de son système de renseignement. Il ne le découvre qu'en le voyant échouer. D'où notre section. Les bretelles et la ceinture de sécurité, pourrait-on dire. Les Nations Unies n'avaient jamais entendu parler de nous, ni la CIA, je crois. Tout ce que je savais vraiment de nous, c'était la formation que j'avais reçue et les missions que le Vieux m'avait confiées. Des missions intéressantes si vous ne vous souciez pas de l'endroit où vous dormez, de ce que vous mangez, ni de la durée de votre vie. Si j'avais eu un peu de bon sens, j'aurais démissionné et pris un travail normal.


Le seul problème, c'est que je n'aurais plus travaillé pour le Vieux. C'est ce qui fait la différence.

Ce n'est pas qu'il était un patron mou. Il était capable de dire : « Les gars, il faut fertiliser cet arbre. Sautez dans ce trou à sa base et je vous couvrirai. »


On l'aurait fait. N'importe lequel d'entre nous l'aurait fait. Et le vieil homme nous aurait enterrés vivants, aussi, s'il pensait qu'il y avait une probabilité de 53% que ce soit l'Arbre de la Liberté qu'il nourrissait.

Il se leva et boita vers moi alors que j'entrais dans les bureaux de notre section par une cabine de toilettes de la station MacArthur. Son visage se fendit d'un sourire malicieux. Son gros crâne glabre et son nez romain lui donnaient l'air d'un croisement entre Satan et Guignol. « Bienvenue, Sam, dit-il. Désolé de te sortir du lit. »

Bon sang, il était désolé ! « J'étais en congé, ai-je répondu brièvement.
— Ah, mais vous l'êtes toujours. Nous partons en vacances.
— Alors je m'appelle 'Sam', ai-je répondu en ignorant délibérément sa plaisanterie sur les ‘vacances’. Quel est mon nom de famille ?
— Cavanaugh. Et je suis ton oncle Charlie-Charles M. Cavanaugh, retraité. Je te présente ta soeur Mary. »

J'avais été conscient qu'il y avait une autre personne dans la pièce, mais quand le Vieux est présent, il obtient toute l'attention tant qu'il le veut. J'ai donc regardé ma ‘sœur’, puis je l'ai regardée à nouveau. Cela en valait la peine.

Je pouvais voir pourquoi il nous avait établis comme frère et sœur si nous devions faire un travail ensemble ; cela lui donnerait un tableau sans problème. Un agent endoctriné ne peut pas briser son personnage supposé, pas plus qu'un acteur professionnel ne peut intentionnellement bâcler son texte. Je dois donc traiter celui-ci comme ma sœur — un sale tour dans le genre, et je m’y connaissais...

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La traduction française de Alain Glatiny de 1954, pour le Rayon Fantastique Hachette, Denoël Présence du Futur 1972, 1979, 1984, 1995, Gallimard Folio SF 2005 et 2011 :

CHAPITRE I

Etaient-ils vraiment doués d’intelligence ? d’une intelligence personnelle, tout au moins ? Je n’en sais rien. Je ne sais pas non plus si nous pourrons jamais arriver à le déterminer.

Ce que je puis dire c’est que, s’ils ne l’étaient pas, j’espère ne jamais voir le jour où nous devrons entrer en lutte contre des êtres similaires qui, eux, le seraient ! Je connais d’avance les perdants : moi, vous, bref, ceux que l’on appelle les humains.

En ce qui me concerne, l’aventure a commencé (trop tôt à mon gré !) le matin du 12 juillet 2007. Mon téléphone s’était mis à vibrer à m’en arracher la peau du crâne. Il faut dire que les téléphones dont on se sert à la Section ne sont pas d’un modèle standard : l’audiorelais est inséré chirurgicalement sous la peau derrière l’oreille gauche, les os jouant le rôle de conducteurs. Je me tâtai machinement avant de me rappeler que j’avais laissé ce que je cherchais dans mon veston, à l’autre bout de la pièce.

« Ça va, grommelai-je, j’ai entendu. Pas la peine de faire un tel boucan.
— Appel urgent, dit une voix dans mon oreille. Venez immédiatement au rapport ! »
Je lui dis sans ambages ce que je lui conseillais de faire de son appel urgent.
« Le Patron attend », insista la voix.

Cela changeait l’aspect de la question. « On y va », dis-je en me rasseyant avec une secousse qui me fit affreusement mal derrière les yeux. Je passai dans ma salle de bains, m’injectai un centigramme de « gyro », et confiai au vibro-masseur le soin de me disloquer les membres pendant que la drogue me les remettait en place. Quand je sortis de là, j’étais un homme nouveau, ou du moins quelque chose qui y ressemblait vaguement. J’enfilai mon veston, et sortis de chez moi.

Je pénétrai dans les bureaux de la Section par un lavabo de la gare Mac Arthur. Notre adresse ne figure pas dans l’annuaire du téléphone. A vrai dire nous n’avons pas d’adresse. Tout ce qui nous concerne est une espèce d’illusion d’optique. On peut aussi arriver chez nous par une petite boutique dont l’enseigne porte l’inscription « Timbres et monnaies anciennes ». N’essayez pas non plus de passer par là. Tout ce que vous y gagneriez serait de vous faire vendre un Bonne-Espérance triangulaire.

A vrai dire, il vaut mieux ne pas essayer du tout. Je vous répète que nous n’existons pas.

Il y a une chose qu’aucun chef d’Etat ne peut savoir : c’est la valeur de son service de renseignements. Il ne l’apprend que par les échecs de ce dernier. C’est justement la raison d’être de notre Section. Nous tenons lieu de cadre et de soutien aux autres sections du Service secret. Les Nations Unies n’ont jamais entendu parler de nous ; le Service central de renseignements non plus — du moins, je le crois. Tout ce que je connais moi-même de nos activités, c’est l’entrainement que j’ai reçu et les missions que me confie le Patron. Ce sont des missions intéressantes d’ailleurs, à condition de ne pas se soucier de l’endroit où l’on mange et où l’on dort, ni de ce que l’on mange, ni de l’âge auquel on mourra. Si j’avais deux sous de bon sens, j’aurais depuis longtemps démissionné et cherché du travail ailleurs.

Seulement dans ce cas, je n’aurais plus travaillé sous les ordres du Patron, et ça, c’est quelque chose qui compte !

Oh ! n’allez pas vous imaginer que le Patron soit un chef coulant ! Il serait capable de vous dire à l’improviste ! « Mes enfants, voilà un chêne qui manque d’engrais. Vous voyez ce trou qui est au pied ? Sautez dedans et je le reboucherai ! »
Nous l’aurions fait. Chacun de nous l’aurait fait sans hésiter.

Le Patron aussi, du reste, s’il avait pensé qu’il y eût seulement cinquante-trois chances sur cent pour que l’opération sauvât le pays d’une catastrophe. Il se leva en me voyant entrer, et s’avança vers moi en boitillant. Un sourire malicieux lui retroussait les lèvres.

Avec son grand crâne chauve et son nez busqué, il avait l’air moitié démon, moitié polichinelle.
« Bonjour, Sam, me dit-il. Je regrette bien de t'avoir tiré du lit. »
Vous pensez comme je l’ai cru !

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Ici la page du forum Philippe-Ebly.fr consacrée à ce roman.

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