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- Écrit par David Sicé
Voici la liste des articles de ce blog consacrés aux films de Science-fiction, Fantasy, Fantastique et Aventure annoncé pour l'année 1950. Cette liste sera mise à jour au fur et à mesure de la rédaction des articles.
Ici le calendrier cinéma pour 1951.
Ici le calendrier cinéma pour 1949.
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Annoncés en juin 1950
En Angleterre
Le petit garçon aux cheveux verts (19 juin, The Boy With Green Hair)
Annoncés en mai 1950
En France
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Annoncés pour mars 1950
En France
La beauté du Diable (16 mars, Beauty and the Devil)
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- Écrit par David Sicé
The Dying Earth (1950)
Traduction du titre : La Terre Mourante.
Sorti aux USA en 1950 chez Hillman Periodicals, Inc. US.
Traduit en français le 21 mai 1978 par France-Marie Watkins pour J’ai Lu ;
Réédité en avril 1984, janvier 1989, décembre 1992, avril 2003 ;
Réédité en omnibus en octobre 2010 chez PYGMALION.
Traduction de France-Marie Watkins révisée par Sébastien Guillot, chez MNEMOS le 12 novembre 2021.
De Jack Vance.
Pour adultes et adolescents.
(Fantasy post-apocalyptique, monstre, sorcier) Le sorcier Turjan n’arrive pas à créer des créatures vivantes sinon pitoyables. Il cherche alors à trouver un sorcier dont la réputation lui garantira le succès, mais il y aura un prix à payer pour son apprentissage.
*
Le texte original de Jack Vance.
1. TURJAN OF MIIR
TURJAN SAT in his workroom, legs sprawled out from the stool, back against and elbows on the bench. Across the room was a cage; into this Turjan gazed with rueful vexation. The creature in the cage returned the scrutiny with emotions beyond conjecture.
It was a thing to arouse pity—a great head on a small spindly body, with weak rheumy eyes and a flabby button of a nose. The mouth hung slackly wet, the skin glistened waxy pink. In spite of its manifest imperfection, it was to date the most successful product of Turjan's vats.
Turjan stood up, found a bowl of pap. With a long-handled spoon he held food to the creature's mouth. But the mouth refused the spoon and mush trickled down the glazed skin to fall on the rickety frame.
Turjan put down the bowl, stood back and slowly returned to his stool. For a week now it had refused to eat. Did the idiotic visage conceal perception, a will to extinction? As Turjan watched, the white-blue eyes closed, the great head slumped and bumped to the floor of the cage. The limbs relaxed: the creature was dead.
Turjan sighed and left the room. He mounted winding stone stairs and at last came out on the roof of his castle Miir, high above the river Derna. In the west the sun hung close to old earth; ruby shafts, heavy and rich as wine, slanted past the gnarled boles of the archaic forest to lay on the turfed forest floor. The sun sank in accordance with the old ritual; latter-day night fell across the forest, a soft, warm darkness came swiftly, and Turjan stood pondering the death of his latest creature.
He considered its many precursors: the thing all eyes, the boneless creature with the pulsing surface of its brain exposed, the beautiful female body whose intestines trailed out into the nutrient solution like seeking fibrils, the inverted inside-out creatures . . . Turjan sighed bleakly. His methods were at fault; a fundamental element was, lacking from his synthesis, a matrix ordering the components of the pattern.
As he sat gazing across the darkening land, memory took Turjan to a night of years before, when the Sage had stood beside him.
"In ages gone," the Sage had said, his eyes fixed on a low star, "a thousand spells were known to sorcery and the wizards effected their wills. Today, as Earth dies, a hundred spells remain to man's knowledge, and these have come to us through the ancient books ... But there is one called Pandelume, who knows all the spells, all the incantations, cantraps, runes, and thaumaturgies that have ever wrenched and molded space .. ." He had fallen silent, lost in his thoughts.
"Where is this Pandelume?" Turjan had asked presently.
"He dwells in the land of Embelyon," the Sage had replied, "but where this land lies, no one knows."
"How does one find Pandelume, then?"
The Sage had smiled faintly. "If it were ever necessary, a spell exists to take one there."
Both had been silent a moment; then the Sage had spoken, staring out over the forest.
"One may ask anything of Pandelume, and Pandelume will answer—provided that the seeker performs the service Pandelume requires. And Pandelume drives a hard bargain."
*
Traduction au plus proche
1. Turjan de Miir
TURJAN s’assit dans son atelier, les jambes écartées depuis le tabouret, le dos contre et les coudes sur l’établi. De l'autre côté de la pièce, il y avait une cage. Dans celle-ci, Turjan regardait avec une irritation coupable. La créature dans la cage lui rendit son regard avec des émotions au-delà de la conjoncture .
C’était une chose qui provoquait la pitié — une grosse tête sur un petit corps maigre, avec des yeux faibles et chassieux et un bouton flasque en guise de nez. La bouche pendouillait, baveuse, la peau luisait d'un rose cireux. En dépit de son imperfection manifeste, c'était à ce jour le produit le plus abouti des cuves de Turjan.
Turjan se leva, trouva un bol de papaye. Avec une cuillère à long manche, il tint la nourriture à la hauteur de la bouche de la créature. Mais la bouche refusa la cuillère et la bouillie coula le long de la peau vitreuse pour dégoutter sur le cadre branlant.
Turjan reposa le bol, recula et retourna à pas lents à son tabouret. Cela faisait une semaine que la chose refusait de manger. Ce visage idiot cachait-il un entendement, une volonté d'extinction ? Comme Turjan regardait, les yeux bleu-blanc se refermèrent, la grosse tête s’affaissa et heurta le fond de la cage. Les membres se détendirent : la créature était morte.
Turjan soupira et quitta la pièce. Il monta des escaliers de pierre en colimaçon et sortit enfin sur le toit de son château Miir, très au-dessus de la rivière Derna. À l'ouest, le soleil flottait tout proche de la vieille terre ; des rayons de rubis, lourds et riches comme le vin, filtraient entre les troncs noueux de la forêt archaïque pour raser le sol à l’herbe courte. Le soleil sombra selon l'ancien rituel, la nuit de la fin des temps tomba sur la forêt, une obscurité douce et chaude s’abattit rapidement, et Turjan resta là à méditer sur la mort de sa dernière créature.
Il songea à ses nombreuses devancières : la chose qui n'avait que des yeux, la créature sans os dont la surface pulsante du cerveau était exposée, le merveilleux corps féminin dont les intestins dardaient pour plonger dans la solution nutritive comme des fibrilles en quête, les créatures retournées, l’intérieur à l’extérieur . . . Turjan soupira sombrement. Ses méthodes étaient en cause ; un élément fondamental manquait à ses synthèses, une matrice qui ordonnerait correctement les composantes du modèle.
Alors qu'il restait assis à contempler le paysage qui s'assombrissait, les souvenirs de Turjan le ramenèrent à une nuit d’il y avait des années auparavant, lorsque le Sage se tenait alors à ses côtés.
« Aux âges disparus, avait dit le Sage, les yeux fixés sur une étoile basse sur l’horizon, un millier de sortilèges étaient connus de la sorcellerie et les sorciers exauçaient le moindre de leurs vœux. Aujourd'hui, alors que la Terre se meurt, une centaine de sortilèges sont encore connus des humains, et ceux-ci nous sont parvenus par l’entremise de livres très anciens... Mais celui nommé Pandelume, qui connaît tous les sortilèges, toutes les incantations, toutes les tours, toutes les runes et toutes les thaumaturgies qui aient jamais déchiré et remodelé l'espace... » Il s'était tu, perdu dans ses pensées.
« Où est ce Pandelume ?" Turjan avait à ce point demandé.
— Il réside dans le pays d'Embelyon, avait répondu le Sage, mais où se trouve ce pays, personne ne le sait.
— Comment trouve-t-on Pandelume, alors ? »
Le Sage avait souri du bout des lèvres. « Si jamais cela s'avérait nécessaire, un sortilège existe pour transporter quelqu’un là-bas. »
Tous les deux restèrent un temps silencieux, puis le Sage avait de nouveau parlé regardant au loin par-dessus la forêt.
« On peut demander n'importe quoi à Pandelume, et Pandelume répondra — à supposer que le demandeur accomplissent le service que Pandelume exige. Et Pandelume ne lâche rien. »
*
La traduction française de France-Marie Watkin de 1978 pour J’ai Lu.
TURJAN DE MIIR
Turjan était assis sur un tabouret dans son atelier, le dos et les coudes appuyés contre l’établi, les jambes allongées devant lui. Au fond de la pièce il y avait une cage, que Turjan contemplait avec irritation. La créature dans la cage lui rendait son regard avec une émotion dépassant l’entendement.
C’était une chose éveillant la pitié, une énorme tête sur un petit corps malingre, avec des yeux myopes et chassieux et un petit bouton de nez mou. La bouche aussi était molle, humide, la peau d’un rose luisant. Malgré son imperfection évidente, c’était à ce jour le produit le plus réussi des cuves de Turjan.
Turjan se leva, trouva un bol de bouillie. Avec une cuiller à long manche, il approcha de la nourriture de la bouche de la créature. Mais la bouche refusa la cuillerée, et la bouillie coula sur la peau vitreuse pour tomber sur la charpente rachitique.
Turjan posa le bol et retourna lentement vers son tabouret. Depuis une semaine déjà, la chose refusait de manger. Est-ce que ce visage idiot dissimulait une intention, une volonté de disparaître ? Sous le regard de Turjan, les yeux blanc-bleu se fermèrent, la lourde tête s’affaissa et tomba sur le sol de la cage. Les membres se détendirent ; la créature était morte.
Turjan soupira et sortit de la pièce. Par l’escalier de pierre en colimaçon, il grimpa sur le toit de son château de Miir, dominant de très haut le fleuve Derna. A l’ouest, le soleil planait tout près de la vieille terre, des rais de rubis, lourds et chauds comme du vin, tombaient en biais entre les tronc rabougris de la forêt archaïque pour s’étendre sur l’humus. Le soleil se couchait selon le rite millénaire ; la nuit des temps modernes tomba sur la forêt, une douce et tiède obscurité s’étendit rapidement, et Turjan songea à la mort de sa dernière créature.
Il se rappela ses nombreux précurseurs : la chose qui n’était qu’yeux, la créature sans os avec la surface palpitante de son cerveau dénudée, le merveilleux corps féminin dont les intestins sortaient et se tordaient comme des vrilles, dans la solution nutritive, les créatures inversées, retournées comme des gantas… Turjan poussa un profond soupir. Ses méthodes étaient défectueuses ; il manquait à sa synthèse un élément fondamental, une matrice ordonnant les composants du schéma.
Alors qu’il contemplait le paysage obscurci, sa mémoire l’entraîna vers une autre nuit, vers des années passées, quand le Sage s’était trouvé auprès de lui.
— Dans les temps enfuis, avait dit le Sage, le regard rivé sur une étoile à l’horizon, la sorcellerie connaissait mille charmes, et les sorciers accomplissaient leurs volontés. Aujourd’hui, alors que la Terre se meurt, il reste cent charmes dans la science des hommes, qui nous ont été transmis par les livres anciens… Mais il en est un, appelé Pandelume, qui connaît tous les sorts, toutes les incantations, les sortilèges, les runes et les thaumaturgies qui ont jamais forgé et modelé l’espace…
Il s’était tu, perdu dans ses pensées.
— Où est ce Pandelume ? avait enfin demandé Turjan.
— Il habite le pays d’Embelyon, mais où se trouve cette terre, nul ne le sar.
— Comment trouve-t-on Pandelume, alors ?
Le Sage avait souri tristement.
— Si cela devient nécessaire, un charme existe pour s’y transporter.
Tous deux avaient gardé le silence un moment, et puis le Sage avait parlé, en contemplant la forêt. On peut demander n’importe quoi à Pandelume et Pandelume répondra... à condition que le chercheur accomplisse ce que désire Pandelume. Et Pandelume marchande âprement.
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Ici la page du forum Philippe-Ebly.fr consacrée à ce recueil de nouvelles.
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Ici la page amazon.fr du roman grand format La Saga de Zeï (collection Trésors de la S-F)
The Search For Zei (1950)
Traduction du titre original : à la recherche de Zei.
Autres titres : The Floating Continent (le continent flottant) ; Hand Of Zei part 1 (la main de Zei) ; Viagens Interplanetarias (cycle) ; Krishna 2 (serie).
Sorti aux USA de octobre 1950 à janvier 1951 dans le magazine Astounding Science Fiction.
Sorti aux USA en 1963 chez ACE BOOKS (poche, les deux parties Search For Zei et Hand of Zei imprimées dos à dos).
Sorti en France en 1971 chez OPTA (Galaxie Bis numéro 22/88, traduction de Michel Rivelin)
Sorti en France le 30 octobre 1975 chez LE MASQUE FR (traduction de Michel Rivelin)
Sorti en France le 9 juillet 2009 chez BRAGELONNE (trésor de la SF, traduction de Michel Rivelin et Collin Delavaud)
De L. Sprague de Camp (Lyon Sprague de Camp).
Résumé à venir.
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(traduction au plus proche, la version 1962)
Dirk Barnevlelt voûta son grand corps aux allures de Caribou sur sa machine à écrire et rédigea:
A vingt-cinq degrés nord de l'équateur sur la planète Krishna s'étend la Mer Benjao,le plus grand volume d'eau sur cette planète. Et dans cette Mer se trouve le Sungar, le pays de légende et de mystère.
Là-bas, sous les rayons torride du soleil brûlant haut, les galères crochues de Dour et les vaisseaux de charge ventrus de Jaz-Mourien pourrissaient lentement prises au piège implacable d'un vaste continent de liane marine Terpahla. Même les violents orages subtropicaux Krishniens ne faisaient guère plus qu’ébouriffer la surface de cet immense marécage flottant - lequel, quoi qu'il en soit, parfois se soulevait et crevait sous les coups de l'affreuse vie marine de la planète, tel le Gvam, ou Harponneur.
Barnevelt se renfonça dans son siège pour se demander: cela faisait deux années qu'il écrivait au sujet des lieux que Igor Shtain avait exploré; verrait-il jamais un seul d'entre eux? Si sa mère mourrait... Mais c'était peu probable. Avec la gériatrie moderne, elle pourrait tenir bon un siècle de plus. Il avait encore un arrière-arrière grand-père en vie aux Pays-Bas. Par ailleurs, il réalisa, avec mauvaise conscience, que ce n'était pas une façon de penser à sa mère. Il reprit :
Rien, une fois pris dans cette toile d'araignée d'algues folles, ne pouvait s'en échapper, à moins de pouvoir s'envoler...
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(texte original, la version de 1962)
Dirk Barnevelt hunched his mooselike form over his typewriter and wrote:
Twenty-five degrees north of the equator on the planet Krishna lies the Banjao Sea, the largest body of water on this planet. And in this Sea is found the Sunqar, home of legend and mystery.
Here under the scorching rays of the hot high sun, the beaked galleys of Dur and the tubby roundships of Jaz-murian slowly rot in the unbreakable grip of a vast floating continent of the terpahla sea vine. Even the violent storms of the Krishnan sub-tropics no more than ruffle the surface of this immense floating swamp— which, however, sometimes heaves and bubbles with the terrible sea life of the planet, such as the gvam or harpooner.
Barnevelt sat back to wonder: For a couple of years he'd been writing about the places that Igor Shtain explored; would he ever see any of them? If his mother died… But that was unlikely. With modern geriatrics she'd be good for another century. He still had a great-great-grandfather alive in the Netherlands. Besides, he thought guiltily, that was no way to think about one's mother. He resumed:
Nothing, once caught in this web of weed, can escape unless it can fly like the aqebats that wing over from the mainland to prey on the smaller sea life of the Sunqar. Here time means nothing; nothing exists save silence and heat and the stench of the strangling vine.
At least, thought Barnevelt, this hack writing was better than trying—as he had once tried—to ram the glories of English literature down the unwilling throats of rural adolescents with only two interests: sex, and escape from the toils of the public school system.
To the heart of this forbidding place Igor Shtain, most celebrated of living explorers, plans to penetrate on his forthcoming Krishnan expedition, to clear up once and for all the sinister rumors that for years have issued from this undiscovered country.
***
(Traduction de Michel Rivelin)
1
Dirk Barnevelt enleva la housse de sa machine à écrire et se mit au travail :
A quelque vingt-cinq degrés au nord de l'équateur de Krishna s'étend la Mer Banjao, la plus grande étendue d'eau de la planète. Là se cache le Sunqar, empire de légende et de mystère. Sous les rayons torrides de Roqir pourrissent lentement les galères pointues de Dur et les trirêmes ventrues de Jazmurian, prises dans l'étreinte impitoyable de ce vaste continent flottant, mi-aquatique, mi-végétal.
Même les violents orages qui sévissent dans cette partie de la planète arrivent à peine à rider la surface de cet immense marécage glauque. Pourtant, parfois, apparaît un bouillonnement sinistre qui révèle la présence des monstres qui règnent en maîtres incontestés des profondeurs, le plus redoutable étant le gvàm, autrement appelé le harponneur.
Barnevelt s'adossa confortablement contre son siège et laissa errer son imagination : il y avait déjà deux ans qu'il décrivait laborieusement les endroits explorés par Igor Shtain; les verrait-il un jour? Peut-être si sa mère mourait... Mais cela était peu probable. Grâce aux progrès de la gériatrie moderne, elle pouvait tenir le coup pendant encore un siècle. Son arrière-arrière grand-père, qui habitait les Pays-Bas, était bien vivant. Et puis, pensa-t-il coupablement, ce n'est pas ainsi qu'un homme doit penser à sa mère. Il reprit son récit:
Rien, une fois pris dans cette toile d'herbes et de racines, ne peut s'en échapper. Seul ce qui vole...
***
(traduction au plus proche, la version magazine de 1950)
Dirk Barnevlelt voûta son grand corps aux allures de Caribou sur sa machine à écrire et rédigea:
A vingt-cinq degrés nord de l'équateur sur la planète Krishna s'étend la Mer Benjao, le plus grand volume d'eau sur cette planète. Et dans cette mer se trouve le Sungar, le pays de légende et de mystère.
Là-bas, sous les rayons torride du soleil brûlant haut, les galères crochues de Dour et les vaisseaux de charge ventrus de Jaz-Mourien pourrissaient lentement prises au piège implacable d'un vaste continent de liane marine Terpahla. Même les violents orages subtropicaux Krishniens ne faisaient guère plus qu’ébouriffer la surface de cet immense marécage flottant - lequel, quoi qu'il en soit, parfois se soulevait et crevait sous les coups de l'affreuse vie marine de la planète, tel le Gvàm, ou Harponneur.
Barnevelt se renfonça dans son siège pour se demander: cela faisait deux années qu'il écrivait au sujet des lieux que Igor Shtain avait exploré; verrait-il jamais un seul d'entre eux? Si sa mère mourrait - Mais c'était peu probable. Avec la gériatrie moderne, elle pourrait tenir bon un siècle de plus. Il avait encore un arrière-arrière grand-père en vie aux Pays-Bas. Par ailleurs, il réalisa, avec mauvaise conscience, que ce n'était pas une façon de penser à sa mère. Il reprit :
Rien, une fois pris dans cette toile d'araignée d'algues folles, ne pouvait s'en échapper, à moins de pouvoir s'envoler...
***
(texte original, la version de 1950)
Dirk Barnevelt hunched his mooselike form over his typewriter and wrote:
Twenty-five degrees north of the equator on the planet Krishna lies the Banjao Sea, the largest body of water on this planet. And in this sea is found the Sunqar, home of legend and mystery.
Here under the scorching rays of the hot high sun, the beaked galleys of Dur and the tubby roundships of Jaz-murian slowly rot in the unbreakable grip of a vast floating continent of the terpahla sea vine. Even the violent storms of the Krishnan sub-tropics no more than ruffle the surface of this immense floating swamp— which, however, sometimes heaves and bubbles with the terrible sea life of the planet, such as the gvàm or harpooner.
Barnevelt sat back to wonder: For a couple of years he'd been writing about the places Shtain explored; would he ever see any of them? If his mother died - But that was unlikely. With modern geriatrics she'd be good for another century. He still had a great-great-grandfather alive in the Netherlands. Besides, he thought guiltily, that was no way to think about one's mother. He resumed:
Nothing, once caught in this web of weed, can escape unless it can fly like the aqebats that wing over from the mainland to prey on the smaller sea life of the Sunqar. Here time means nothing; nothing exists save silence and haze and heat and the stench of the strangling vine.
At least, thought Barnevelt, this hack writing was better than trying—as he had once tried—to ram the glories of English literature down the unwilling throats of rural adolescents with only two interests: sex, and escape from the toils of the public school system.
To the heart of this forbidding place Igor Shtain, most celebrated of living explorers, plans to penetrate on his forthcoming Krishnan expedition, to clear up once and for all the sinister rumors that for years have issued from this undiscovered country.
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- Écrit par David Sicé
Time & Again (1950)
Sorti sous au moins trois titres différents anglais et deux titres français.
Ne pas confondre avec le roman de 1970 de Jack Finney, la nouvelle de 1977 de Breece D'J Pancake, l’épisode Star Trek Voyager S01E04 de 1995, le film américain de 2007, le film de 2019.
Sorti sous le titre Time Quarry, (la carrière du Temps) de octobre à décembre 1950 dans le magazine Galaxy Science-fiction US.
Traduit anonymement en français en novembre 1953 à mars 1954 sous le titre Dans le torrent des siècles dans le magazine français Galaxie.
Réédité en 1962 sous le titre De temps à autres par A. Yeurre (je suppose un pseudonyme pour éviter de mentionner que la traduction est anonyme) pour Hachette / Le Rayon Fantastique.
Retraduit en français par Georges H. Gallet en 1973 pour J’ai Lu (poche), réédité en 1975 et 1984 ; réédité en août 1990 et mars 1993 chez J’ai Lu ; réédité en novembre 2000 chez J’ai Lu.
Compilé dans Les Mines du Temps (en anglais The Time Quarries) en février 2004 chez Omnibus.
De Clifford Simak.
Pour adultes et adolescents.
(Space Opera, voyage dans le temps, presse) Alors que les humains contrôlent la galaxie grâce aux androïdes, Asher Sutton, un explorateur de l'espace, est parti en mission de reconnaissance sur un monde extraterrestre que personne n'a pu jusqu'alors approcher. Vingt années ont passé, plus personne sur Terre n'attend son retour. Un inconnu, prétendant venir du futur, informe le chef de la sûreté qu'un certain Asher Sutton sera de retour sur Terre tel jour et qu'il faudra absolument le tuer.
*
Le texte original de Clifford Simak pour le magazine Galaxy Science-fiction d’octobre 1950.
One life should be enough to give for humanity… but humanity wanted Asher Sutton to keep making the sacrifice indefinitely!
THE man came out of the twilight when the greenish-yellow of the sun’s last glow still lingered in the west. He paused at the edge of the patio and called.
« Mr. Adams, is that you? »
The chair creaked as Christopher adams shifted his weight, startled by the voice. Then he remembered. A new neighbor had moved in across the meadow a day or two ago. Jonathon had told him . . . and Jonathon knew all the gossip within a hundred miles. Human gossip as well as android and robot gossip.
“Come on in,” said Adams. “Glad you dropped around.”
He hoped his voice sounded as hearty and neighborly as he had try to make it. For he wasn’t glad. He was a little nettled, upset by this sudden shadow that came out of the twilight and walked across the patio.
This is my hour, he thought angrily. The one hour I give myself. The hour that I forget . . . forget the thousand problems that have to do with other star systems. Forget them and turn back to the green-blackness and the hush and the subtle sunset shadow-show that belong to my own-planet. For here on this patio, there are no mentophone reports, no robot files, no galactic co-ordination conferences . . . no psychological intrigue, no alien reaction charts. Nothing complicated or mysterious.
With half his mind, he knew the stranger had come across the patio and was reaching out a hand for a chair to sit in; and with the other half, once again, he wondered about the blackened bodies lying on the river bank on far-off Aldebaran XII and the twisted machine that was wrapped around the tree.
Three humans had died here . . . three humans and two androids, and androids were almost human, different only in that they were manufactured instead of born. And humans must not die by violence unless it be by the violence of another human. Even then it must be on the field of honor, with all the formality and technicality of the code duello, or in the less polished affairs of revenge or execution.
*
La traduction au plus proche.
Une seule vie devrait suffire pour l'humanité... mais l'humanité voulait qu'Asher Sutton continue à se sacrifier indéfiniment !
L'homme sortit du crépuscule alors que le jaune verdâtre de la dernière lueur du soleil s'attardait encore à l'ouest. Il s'arrêta au bord du patio et appela.
« M. Adams, c'est vous ? »
La chaise grince tandis que Christopher Adams se déplace, surpris par la voix. Puis il se souvint. Un nouveau voisin avait emménagé de l'autre côté de la prairie il y a un jour ou deux. Jonathon le lui avait dit... et Jonathon connaissait tous les potins dans un rayon de cent miles. Les ragots humains, mais aussi ceux des androïdes et des robots.
"Entrez", dit Adams. "Content que vous soyez passé dans le coin".
Il espérait que sa voix était aussi chaleureuse et voisine qu'il avait essayé de le faire. Car il n'était pas content. Il était un peu déconcerté, dérangé par cette ombre soudaine qui sortait du crépuscule et traversait son patio.
C'est mon heure, il pensa avec colère. L'heure que je m'accorde. L'heure où j'oublie... ... j’oublie les milliers de problèmes qui concernent les autres systèmes stellaires. Je les oublie et m’en retourne à l’obscurité verte, au silence, et aux subtils jeux d'ombres du coucher de soleil qui appartiennent à ma planète à moi. Car ici, sur ce patio, il n'y a pas de rapports mentophoniques, pas de dossiers robotisés, pas de conférences de coordination galactique. Il n'y a pas d'intrigues psychologiques, pas de diagrammes de réactions extraterrestres. Rien de compliqué ou de mystérieux.
Avec la moitié de son esprit, il savait que l'étranger avait traversé le patio et tendait la main pour s'asseoir sur une chaise ; et avec l'autre moitié, une fois de plus, il s'interrogeait sur les corps noircis qui gisaient sur la rive d’un fleuve sur la lointaine Aldebaran XII, et sur la machine tordue qui s'enroulait autour de l'arbre.
Trois humains étaient morts là-bas. Trois humains et deux androïdes, et les androïdes étaient presque humains, différents seulement en ce qu'ils étaient fabriqués au lieu d'être nés. Et les humains ne doivent pas mourir par la violence, à moins que ce ne soit par la violence d'un autre humain. Et même dans ce cas, ce doit être sur le champ d'honneur, avec tout le formel et la procédure du codex duello*, (NDT : je corrige la citation en latin médiéval, traduction : le code dans l’intérêt du duel) ou dans les affaires moins polies de la vengeance ou de l'exécution.
*
La traduction anonyme de novembre 1953 pour le magazine français Galaxie.
On était au crépuscule. Les dernières lueurs du soleil, disparru à l’ouest, étaient encore orangées. Et alors, apparut la silhouette humaine. Elle s’arrêta à l’entrée de la cour dallée, appela :
— Monsieur Adams… vous êtes là ?
Le fauteuil gémit sous le poids de Christopher Adams avant qu’il ne se levât brusquement. Il avait tressailli. Puis il se souvint. Jonathan lui avait parlé de l’inconnu, installé depuis peu dans le secteur qui s’étendait au-delà des vastes pelouses. Ce Jonathan était au courant de tout, il connaissait les cancans à cent milles à la ronde, aussi bien ceux des hommes que des androïdes et des robots. Adams articula :
— Entrez… Enchanté, monsieur.
Mais sa voix était mal assurée, son ton affecté. Car en réalité, il n’était pas enchanté du tout. Il éprouvait de l’agacement, voire un malaise confus, de la présence d’un individu, dans l’ombre.
Ce moment de la journée représentait pour Adams, l’heure d’oubli. Oubli des milliers de problèmes ayant trait aux systèmes planétaires, stellaires et autres. L’heure où il aimait ramener son regard autour de lui, penser à tout ce que représentait sa propre planète, savourer le calme des frondaisons dont le vert devenait sombre… Contempler les teintes délicates du coucher du soleil.
Car là, dans la cour dallée, il n’y avait pas de communications transmises par mentophone, pas de robots, pas de conférences galactiques — on disait aussi galaxiques ou galaxiennes — pas d’intrigues psychologiques, pas de rapports plus ou moins ennuyeux sur le comportement de quelque étoile ou planète étrangère ou hostile.
En un mot, rien de mystérieux, rien qui ne fût compliqué.
Une moitié de son cerveau enregistra l’arrivée de l’inconnu s’apprêtant à s’installer dans un fauteuil, cependant que l’autre s’emplissait, une fois de plus, de la pensée de ces cadavres noircis gisant sur la berge du fleuve, dans le lointain Aldebarran-XII, et de la machine volante aux débris tordus et enroulés autour du tronc d’arbre.
Cinq victimes, dont trois Humains et deux Androïdes. Les Androïdes étaient presque des Humains, puisqu’ils en avaient l’apparence, puisqu’ils étaient de chair, d’os et de sang… Mais ils étaient d’origine chimique et non biologique. On les fabriquait en usine, il ne naissaient pas et ne subissaient aucune des phases de croissance propres aux Humains.
Le trépas de ces derniers était beaucoup plus grave. La loi interdisait leur mort violente, à moins d’être provoquée par un autre humain. Et même, dans ce cas, ce ne pouvait être que dans un combat d’honneur dûment réglementé par le code du duel… Ou au pis aller, lors d’une vengeance ou d’une exécution.
*
La traduction française de Georges H. Gallet pour J’ai Lu.
1
L’homme surgit du crépuscule alors que la dernière lueur jaune-vert du soleil s’attardait encore à l’ouest. Il s’arrêta au bord du patio et appela :
— Mr Adams, vous êtes là ?
Le fauteuil craqua quand Christopher Adams sursauta, surpris parla voix. Puis il se souvint. Un nouveau voisin était venu s’installer de l’autre côté de la prairie, depuis un jour ou deux. Jonathon le lui avait dit… et Jonathon était au courant de tout à cent cinquante kilomètres à la ronde. De tout ce que disaient les hommes, les androïdes et les robots.
— Entrez donc, dit Adams. Vous êtes le bienvenu.
Il espéra que sa voix était aussi cordiale et aussi aimable qu’il le souhaitait.
En fait il n’était pas content. Il était même un peu irrité, troublé par cette silhouette soudaine qui surgissait du crépuscule et traversait le patio.
Il passa mentalement la main sur son front.
C’est mon heure, se dit-il. L’heure que je me donne. L’heure où j’oublie… où j’oublie les mille problèmes qui concernent d’autres étoiles. Où je les oublie et me tourne vers l’obscurité verte et le silence et les jeux d’ombres subtils du coucher du soleil qui appartiennent à ma propre planète.
Car ici, dans ce patio, il n’y a pas de rapports par mentophone, pas de classeurs robots, pas de conférences de coordination galactique… pas d’intrigues psychologiques, pas de courbes de réactions des extraterrestres ; rien de compliqué ni de mystérieux… Quoique je puisse me tromper, car il y avait du mystère ici, un mystère feutré, paisible, que l’on peut comprendre et qui ne reste mystérieux que parce que je le veux ainsi. Le mystère de l’engoulevent dans le ciel qui s’assombrit, l’énigme de la luciole dans la baie de lilas.
Une moitié de son cerveau savait que l’étranger avait traversé le patio et qu’il tendait la main vers un fauteuil pour s’y asseoir, tandis que l’autre moitié s’interrogeait de nouveau sur ces corps carbonisés qui gisaient au bord du fleuve, sur la lointaine planète Aldébaran XII, et sur cette machine tordue, enroulée autour d’un arbre.
Trois êtres humains étaient morts là-bas... trois humains et deux androïdes, et les androïdes étaient presque des humains. Et les humains ne devaient pas mourir par la violence, à moins que cela ne fût par la violence d’un autre humain. Et même alors, ce devait être pour une affaire d’honneur avec toutes les formes et les règles du code du duel ou dans les affaires moins raffinées de vengeance ou d’exécution.
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Ici la page du forum Philippe-Ebly.fr consacrée à ce roman.
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